Lubrizol : recommandations de l’Anses pour la mise en place de la surveillance à long terme des denrées alimentaires
Suite à l’incendie de l’usine Lubrizol, deux phases de gestion ont été mises en place par les autorités pour maîtriser les risques d’exposition par l’alimentation. Lors de la première étape, les échantillons prélevés avaient pour objectif de rechercher les contaminants susceptibles d’être associés à l’incendie dans des denrées alimentaires situées sous le passage du panache et de mesurer leur niveau. Cette recherche a concerné tant les aliments destinés à l’Homme qu’aux animaux. Les avis successifs de l’Anses formulés au vu des analyses reçues n’ont pas mis en évidence de niveau de contamination pouvant conduire à des risques accrus d’exposition par l’alimentation à court terme.
Afin d’évaluer les risques dans la durée, il est nécessaire de documenter l’exposition par l’alimentation aux polluants associés à l’incendie susceptibles de s’accumuler et de migrer via d’autres milieux comme les eaux, les sols, les végétaux. Le sol peut être une source de contamination par ingestion directe par les animaux, par transfert aux végétaux qui seront ingérés par les animaux et par l’Homme, ou encore par transfert via le réseau hydrologique.
Les recommandations de l’Anses relatives à la stratégie de surveillance visent à protéger la santé des consommateurs au regard d’une exposition chronique aux contaminants par l’alimentation.
Les experts de l’Anses ont intégré dans leurs travaux les résultats des 606 prélèvements réalisés sur les productions alimentaires jusqu’au 18 octobre 2019. Leur analyse a notamment consisté à cartographier la répartition des prélèvements pour les quatre principales familles d’aliments, les œufs, les produits laitiers, les légumes et les aliments destinés aux animaux, en fonction de la modélisation de l’impact des retombées de suies du panache réalisée par l’Ineris. L’analyse des cartes n’a pas montré de corrélation évidente entre l’intensité des dépôts et les concentrations des contaminants analysées dans les prélèvements, excepté une tendance pour les dioxines, furanes et polychlorobiphényles dans les œufs.
Sur la base de cette analyse et d’un projet de plan établi par les autorités, l’Agence émet des recommandations afin de finaliser la stratégie de surveillance à mettre en place.
L’Anses rappelle qu’il est indispensable de mesurer la contamination des milieux, en particulier les sols. De ce fait, le dispositif de surveillance préconisé pourra être adapté en fonction des résultats de ces prélèvements, à ce jour non disponibles.
Les experts ont défini et priorisé différentes substances à rechercher pour chaque famille d’aliments : les productions végétales pour l’Homme et les animaux, le lait, les viandes, les œufs issus d’élevage en plein air, les poissons d’élevage, le miel, les aliments pour le bétail stockés en plein air et l’herbe de pâture. Les substances correspondent aux contaminants recherchés lors de la première phase de prélèvements : dioxines et furanes, PCB, HAP, élément-traces métalliques et produits d’extinction.
L’Agence recommande de déterminer les lieux de prélèvement dans la zone impactée par le panache, identifiée lors de la modélisation de l’Ineris. Ces prélèvements ont vocation à être conduits sur une année, en tenant compte des saisons de productions agricoles. Par ailleurs, il serait pertinent d’effectuer certains prélèvements dans les exploitations déjà concernées par la phase 1, afin de mesurer l’évolution dans la durée après l’incendie.
De plus, il est préconisé de privilégier des productions agricoles végétales cultivées en plein champ par rapport aux cultures sous serres ou tunnel ainsi que les productions issues des animaux élevés en plein air.
Sur la base de ses précédents avis, l’Anses recommande de prélever majoritairement des échantillons de :
- denrées alimentaires d’origine animale destinées à la consommation humaine : lait, œufs (en privilégiant les élevages plein air), poissons d’élevage ;
- légumes-racines ;
- ensilage de maïs.
La compilation de l’ensemble des données dans ces milieux permettra d’identifier les contaminations liées au panache de fumée de l’incendie et ainsi d’orienter les différentes actions de suivi de l’exposition des populations.